Hommages à l’occasion du 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz

Le 26 janvier 2025, notre association a nettoyé toutes les « Stolpersteine » et rappelé la mémoire des victimes qu’elles honorent.

Corinne Bouillot

1/29/20254 min read

Le lundi 27 janvier 2025, le monde commémorait le 80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz, où 1,1 million de personnes ont été assassinées, dont plus de 900000 Juifs jugés indignes de vivre au nom d’une idéologie raciste qui bafouait la vie et la dignité humaines. "Nous sommes ici pour proclamer et promettre que nous ne permettrons jamais, jamais à l’histoire de se répéter", déclarait lors de cette cérémonie Tova Friedman, l’une des dernières survivantes présentes aux côtés de Leon Weintraub, qui invitait quant à lui "la nouvelle génération à rester vigilante face aux expressions d’intolérance, de ressentiment envers ceux qui sont différents" et à "prendre très au sérieux ce que préconisent les ennemis de la démocratie ".

C’est aussi le message que répétait inlassablement la Rouennaise Denise Holstein, qui avait été arrêtée lors de la rafle des 15-17 janvier 1943 dans notre département, puis déportée par le convoi 77 du 31 juillet 1944. Elle avait survécu à l’enfer d’Auschwitz-Birkenau et de Bergen-Belsen. Elle nous a quittés le 16 novembre dernier, à l’âge de 97 ans, et celles et ceux parmi nous qui l’avaient entendue faire le terrible récit de sa déportation n’oublieront jamais la force de son témoignage. La Ville de Rouen lui rendra prochainement un dernier hommage.

Pour modestes qu’ils soient, les gestes commémoratifs et les hommages aux victimes organisés par notre association s’inscrivent dans cette volonté de continuer à transmettre la mémoire envers et contre tout, dans un contexte où la résurgence de l’antisémitisme et des idéologies fondées sur l’exclusion de l’Autre nous inquiètent profondément.

Ainsi, le dimanche 26 janvier, veille de cet anniversaire si important, nos adhérents et des élèves ont été appelés à entrenir le souvenir en nettoyant les 110 pavés de mémoire scellés dans les trottoirs de la Métropole Rouen Normandie entre 2020 et 2024. Plusieurs parcours ont été organisés dans les six communes concernées de notre agglomération. D’adresse en adresse, les participants de tous âges ont déambulé aux côtés des familles de victimes qui avaient pu faire le déplacement et dont la présence nous a particulièrement émus.

Ce sont souvent des jeunes, collégiens, lycéens, mais aussi l’arrière-petite-fille d’une victime, qui ont présenté les parcours de vie et de persécution des familles victimes de la Shoah. Ils avaient été préparés en amont par leurs enseignantes dans les collèges rouennais Fontenelle et Barbey d’Aurevilly, le collège Léonard de Vinci de Bois-Guillaume et le lycée Jeanne d’Arc de Rouen. Des élèves de ce dernier, situé autrefois là où se trouve aujourd'hui le collège Barbey, avaient aussi préparé l’apposition d’une plaque dévoilée le lendemain à la mémoire des lycéennes Hélène et Nelly Rechtchaft et Colette Frauenthal, qui ont déjà leurs pavés de mémoire dans Rouen. Des liaisons collège-lycée ont été bâties autour de ces initiatives, de même que des élèves de l’école élémentaire Pottier ont pu suivre un des parcours de nettoyage des pavés de mémoire avec les collégiens.

Ces synergies mémorielles sur notre territoire, qui inclut aussi la ville d’Elbeuf et sa synagogue en voie de restauration et de patrimonialisation, ont une dimension éminemment éducative et pédagogique, avec un appel à ne pas oublier le passé et à combattre les haines du présent par un engagement citoyen.

L’action engagée par notre association s’est poursuivie dans l’après-midi par un temps convivial au collège Fontenelle, accueilli par son principal et des élèves ambassadeurs. Environ 80 personnes, jeunes et moins jeunes sensibilisés à l’importance de la transmission et familles de victimes, s’y sont réunies pour échanger et exprimer leurs émotions. Le lieu de cette rencontre n’avait pas été choisi au hasard, car le collège est aussi un lieu de mémoire. C’est là que durant l’Occupation, le "centre d’accueil" de la rue Poisson (rebaptisée rue des Requis à la Libération) avait, outre le rassemblement des requis du STO et le rapatriement des prisonniers de guerre, servi de centre de transit pour les Juifs arrêtés dans les rafles des 9-10 octobre 1942 et des 15-17 janvier 1943. Avant leur transfert à Drancy et leur déportation, les victimes avaient été internées et confinées sous garde française dans le dortoir de l’établissement qu’en ce jour de commémoration, plusieurs proches des familles assassinées ont pu visiter. Peu de Rouennais connaissant l’histoire de ce lieu, un projet de plaque commémorative à apposer au collège a été évoqué à cette occasion.

On retrouvera sur notre site une évocation des actions du 26 janvier 2025 et de celles menées à d’autres moments. La rubrique "Entretien et hommages" présente quelques photos et retours presse (https://pavesmemoirerouen.fr/nettoyages-hommages), ainsi que des consignes de nettoyage (https://pavesmemoirerouen.fr/consignes-de-nettoyage) pour toutes celles et tous ceux qui, au-delà de notre association, souhaiteraient contribuer à l’entretien des "Stolpersteine" afin de garder la mémoire vivace dans leur commune, leur quartier et les autres villes européennes.